Salles de « shoot » : des zones de non-droit sous la férule de l’Etat

Insécurité, concentration de consommation de crack, prostitution, livraison par les bandes organisées au petit matin, dans des voitures aux vitres teintées : telle est l’atmosphère dramatique qui environne la « salle de shoot » du Xe arrondissement de Paris, rue Ambroise-Paré. Quatre mois à peine après l’ouverture de ce que la Mairie de Paris a pudiquement dénommé la « salle de consommation à moindre risque », le quartier devient jour après jour une zone de non-droit.

La dernière rixe, survenue devant la salle de shoot le 26 février, en est un irréfutable témoignage. « C’est un affrontement entre deux drogués qui a commencé dans la salle d’attente et s’est terminée en vraie bagarre, comme malheureusement on peut en trouver à la sortie de lycées ou du métro La Chapelle », temporise Stéphane Bribard. Une petite querelle sans importance, si l’on en croit le conseiller d’arrondissement délégué à la sécurité qui « espère juste que ça se passera le moins possible ». Après tout, « c’est le premier moment « un peu de violence » », déclare complaisamment l’élu. Complice de l’extravagante permissivité de la Mairie de Paris, l’élu restera sourd aux cris d’alarme des riverains, qui ont exprimé leur désarroi dans une lettre ouverte à destination des autorités.

« L’incident a été traité comme il le fallait », rassure Bribard. Rien à redire, donc, sur le fait que l’un des hommes impliqué dans la rixe ait laissé échapper de son sac une arme à feu. Aucun commentaire, suscité par la distribution, pendant la lutte, de kits d’injection à travers les grilles par les personnels de la salle de shoot. Point d’alarme, à l’égard de l’indulgence des autorités, qui ont laissé la rixe suivre son cours à l’extérieur sans intervenir. Qu’importent les menaces des toxicomanes que reçoivent les clients des échoppes environnantes…

Excédés, les habitants voient leur quartier sombrer chaque jour un peu plus dans la peur. Une angoisse croissante, cette « zone de non-droit » qui s’installe, au détour des rues du Xe arrondissement. « Les policiers se sont fait plus rares », raconte un habitant. « Le trafic et la consommation de drogues se font désormais publiquement et impunément, dans la mesure où dealers et toxicomanes profitent d’un périmètre protégé », souligne le collectif de riverains à l’origine de la missive. Chaque jour, de nouveaux arrivants viennent rôder autour de la salle, dans l’espoir d’alimenter un trafic dont l’Etat s’est fait l’allié.

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La Mairie l’annonçait depuis la création de la SCMR : la salle de shoot n’était pas « une baguette magique ». Mieux encore, ses membres comptent redoubler d’effort. « Nous ferons bilan à l’issue des six premiers mois d’ouverture. Les villes qui ont ouvert une SCMR en ont souvent ouvert d’autres rapidement ». Optimiste, Bertrand Jomier, maire du XIXe siècle, chargé des questions relatives à la santé, pointe la sanité supposée de ces espaces dévastateurs pour la vie du quartier et de ses riverains. Non content de laisser aux mains des délinquants certaines zones de banlieue dans lesquelles la police n’ose même plus pénétrer, c’est désormais au cœur de Paris que l’Etat souhaite faire rayonner la délinquance.

A l’issue de l’ouverture de la salle de shoot, Marisol Touraine avait salué l’ingéniosité de son geste, soulignant qu’il s’agissait « d’un moment très important dans la lutte contre le fléau des addictions ». Contre celui de la criminalité, en revanche…

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