[Laïcité] De la similitude des mesures du Grand Orient de France et de celles de l’AMF

Logo AMFLe rapport de l’Association des Maires de France (AMF) est paru au mois de novembre 2015 : préconisant l’adoption d’une « bonne conduite laïque » au sein des communautés locales et à destination de ses acteurs, il assure que la laïcité, « creuset de l’identité républicaine », se doit d’être adoptée à grande échelle afin de garantir un climat apaisé dans une France en proie à une atmosphère tendue, exacerbée par la croissance du communautarisme. L’année dernière, le 9 décembre 2014, le Grand Orient de France mettait en place une sorte de charte soulevant les mêmes problématiques : dénonçant l’abandon de la question laïque par la sphère politique – « le politique semble abandonner au juge le soin de fixer les limites du territoire de la laïcité au risque de laisser s’installer une certaine insécurité juridique » – et la dangerosité du « réveil des intégrismes et des fondamentalismes religieux », le Grand Orient promettait de se battre contre ces « mouvements extrémistes prônant une contre-société anti laïque et liberticide ». Garantir le pacte républicain, jugé comme le « levier d’un progrès au service du plus grand nombre », semble une préoccupation commune aux deux institutions. Et troublante est la corrélation des mesures et « outils » employés afin de promouvoir cette vision de la laïcité au sein des deux officines.

 

  1. Des outils communs

Une charte. L’association des Maires de France souhaite instaurer une charte locale réaffirmant ce principe de laïcité ; la définition même de son vade-mecum, à destination des maires et des présidents d’intercommunalités répond ainsi parfaitement au souhait du Grand Orient, qui indique dans son deuxième point des « Vingt-cinq propositions pour une République laïque au XXIe siècle » d’adopter une « charte de la laïcité à l’intention des élus et responsables institutionnels » (1).

A l’échelle culturelle. En ce qui concerne le développement de ces principes à l’échelle culturelle, l’AMF garantit le respect de la neutralité dans les officines audiovisuelles et sportives ; elle interpelle notamment le Gouvernement afin que ne soit prônée aucune manifestation à caractère religieux de la part des sportifs nationaux. La 22e proposition du Grand Orient semble préconiser de la même manière cette attitude (2).

Par ailleurs, la vigilance des deux institutions se portent vers les activités culturelles pouvant comporter des éléments d’ordre cultuel. Quoique l’AMF n’aille pas jusqu’à préconiser, comme le Grand Orient, de « mettre un terme au financement public des activités consistant en l’exercice d’un culte, même présentées comme culturelles » (3), l’association rappelle qu’une « commune ne saurait subventionner une manifestation dont le caractère cultuel est affirmé, même si elle est traditionnelle et accompagnée d’actions culturelles ou festives » (4).

         2. Une cible commune : les institutions pédagogiques

 

Application de neutralité. Outre un attachement commun à revaloriser la valeur de la laïcité au sein des établissements scolaires, les moyens préconisés par les deux officines sont assez similaires. Lorsque le Grand Orient de France propose l’éviction des « tenues manifestant ostensiblement une appartenance religieuse » (5), l’AMF évoque, avec le ministre en charge de l’Éducation nationale, l’idée du port de tenues homogènes marquant l’appartenance à l’établissement scolaire (6). Les deux institutions encouragent la tenue de formations visant à apprendre aux acteurs publics comment appliquer la laïcité : si le Grand Orient de France souhaite « Mettre en place un enseignement des conditions historiques et juridiques d’application de la laïcité dans la formation des professeurs, personnels éducatifs et chefs d’établissement » (7), l’AMF, jugeant indispensable la formation à la laïcité des intervenants périscolaires, se félicite déjà « que le CNFPT assure sa part dans le respect de ce principe en mettant en œuvre des formations spécifiques sur la laïcité et en ayant édicté un ouvrage de référence sur ce sujet » (8). L’application de la neutralité par les adultes accompagnant les sorties et déplacements scolaires est également une préoccupation commune à ces deux institutions (9).

Vigilance à l’égard des structures privées. Si, comme le recommande le Grand Orient, l’AMF ne va pas jusqu’à demander de « supprimer l’obligation pour les communes de financer la scolarité des élèves dans les établissements situés dans d’autres communes (…) » (10), la haute vigilance accordée aux établissements privés qu’elle souhaite mettre en place, sous couvert de garantir une plus grande surveillance des enseignements de nature confessionnelle, risque de porter un coup à la liberté de ces institutions (11).

L’élaboration d’une religiosité nouvelle

On remarque une volonté similaire des deux institutions à développer des manifestations (non cultuelles), dites « philosophiques non-confessionnelles, et aux courants de pensée laïques, libres penseurs, athées » (12) ; à ce titre, l’Association des Maires de France souhaitent voir s’instaurer dans les mairies des cérémonies républicaines, instituant à l’échelle locale des sortes de cérémonies républicaines – notamment pour les funérailles et les mariages.

D’aucun défendront que tant de corrélations sont issues de ce même souci des deux officines à promouvoir  la loi de 1905. Cependant, le dernier point, visant à l’installation d’une nouvelle religiosité laïque, contrevient en tout point à celle-ci : de fait, il s’agit bien de l’instauration d’un culte, qui plus est en connivence avec de nombreux acteurs politiques, elle qui contourne cette même loi à laquelle elle est si attachée : « La république ne reconnaît {…} aucun culte ».

(1) La vocation de l’AMF est de produire « un ouvrage complet et pratique répondant aux attentes des maires et présidents d’intercommunalité de France. » Vade-mecum de l’AMF (novembre 2015), p.3.

(2) «Exiger le respect, dans les compétitions olympiques, de l’égalité hommes-femmes et de la règle 50 de la Charte Olympique interdisant toute forme de « propagande politique, religieuse, ou raciale ». 22e proposition des vingt-cinq propositions du Grand Orient de France, 9.12.14.

(3)14ème point des vingt-cinq propositions du Grand Orient de France, 9.12.14.

(4) Vade-mecum de l’AMF, novembre 2015, p.14.

(5) Dix-neuvième point des vingt cinq propositions du Grand Orient de France, 9.12.14.

(6) Vade-mecum de l’AMF (novembre 2015), p.12.

(7) Quatrième point des vingt cinq propositions du Grand Orient de France, 9.12.14.

(8) Vade-mecum de l’AMF, novembre 2015, p.16

(9) Quatorzième point des vingt cinq propositions du Grand Orient de France ; vade-mecum de l’AMF, novembre 2015, p.11-12.

(10) Onzième point des 25 propositions du Grand Orient de France.

(11) L’AMF recommande « d’accorder une attention toute particulière au règlement intérieur de la structure privée et à ses prescriptions concernant l’attitude à adopter par ses personnels, avant tout engagement de la commune et, a fortiori, tout versement de subventions. » Vade-mecum de l’AMF (novembre 2015), p.9.

(12) Vingt et unième point des vingt-cinq propositions du Grand Orient de France, visant au développement de ces courants de pensée sur des chaînes publiques.

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