En regard des tendances économiques et de l’échec global du budget 2015, dont les retards seront reportés sur l’année à venir, le plan budget 2016 présenté par le gouvernement semble irréalisable.
A l’annonce de ce budget serré, les dépenses de l’État constituent l’une des premières sources d’interrogation. Selon le plan 2016, c’est à l’État que revient le principal poids des déficits : il doit assumer 3,3 % des besoins du PIB. Les principales économies portent sur les dépenses de la masse salariale : « Par rapport à la LFI 2015, on enregistre près d’un milliard de baisse des dépenses de ministères (…), et une baisse significative des concours aux collectivités territoriales ». De plus, les économies tendancielles prévues pour 2015 n’ont pas été totalement honorées, créant un report de 1,2 milliard d’euros d’économies tendancielles supplémentaires sur l’année 2016. La faible maîtrise des dépenses gouvernementales fait qu’une grande partie de cette estimation repose sur des expectatives bien souvent optimistes, reposant sur des hypothèses favorables incertaines. La fondation IFRAP va jusqu’à assurer qu’ « il n’y a pas de véritable volonté de maîtriser les effectifs » : les plafonds d’emplois sont désormais presque atteints dans toutes les branches de la fonction publique, puisqu’ils ont augmenté l’année passée de 37 000 (et atteignent aujourd’hui 2 339 683 ETPT, équivalents temps plein annuels travaillés sur 2 351 782 autorisés). Ce plafond a même été repoussé à 2 368 799 pour l’année 2016, ce qui ne va pas dans le sens d’une réduction des effectifs.
Le budget 2016 concentre en réalité la plupart de ses efforts sur les collectivités territoriales. Si l’objectif d’évolution de la dépense publique locale est bien exécuté, il pourrait résulter une baisse des dépenses de 3,5 milliards d’euros. Le gouvernement espère maîtriser cette dépense locale grâce à la baisse des transferts en direction des collectivités territoriales et à l’adoption d’un indicateur budgétaire par les collectivités. Cependant, il faut noter que le déficit local est souvent le fait d’organismes divers d’administration locale, et non des collectivités, ce qui laisse présager des économies moindres que celles espérées. De plus, le manque d’économies de l’année 2015 s’élève à 1,2 milliard d’euros, qu’il conviendra de rattraper au cours de l’année. De surcroît, l’investissement local a fortement baissé, les dépenses de fonctionnement ont quant à elles augmentées du fait du nouveau cycle électoral et de la volonté d’anticiper les réductions budgétaires annoncées. Comme le souligne justement l’IFRAP, « Le pari du gouvernement repose sur le recours au financement de tout ou partie de ces investissement par endettement ». Face à ces problèmes, la fondation IFRAP propose quelques ébauches de solution. En premier lieu il s’agirait de chiffrer les objectifs de dépenses locales en valeur et non pas en volume. Il faudrait aussi fixer un plafond d’endettement afin que les collectivités territoriales réalisent les économies demandées, et ne fassent pas reposer les dépenses sur la dette, permettant une maîtrise des dépenses d’investissement. Il faut pour cela associer les collectivités territoriales aux décisions prises, notamment par le biais de la conférence des finances publiques.
De plus, les décisions gouvernementales relatives à la sécurité entraînent une nette hausse du plafond d’emploi, caractérisées par les embauches de fonctionnaires de police, ou de gendarmerie ou l’annulation de la suppression des postes pour le Défense Nationale. L’état d’urgence décrété au lendemain des attentats du 13 novembre 2015 entraîne notamment une révision de la loi de programmation militaire avec une hausse des effectifs et du budget et une annulation de certaines économies que devaient initialement supporter le ministère de le Défense. Les engagements pris devant le congrès le 16 novembre dernier obligent le gouvernement à engager 815 millions d’euros supplémentaires pour assurer les missions de sécurité intérieure. Cette somme est à ajouter aux 2,2 milliards d’euros promis en juillet dernier suite au réexamen des finances liées à la sécurité nationale.
En conclusion, les objectifs affichés du gouvernement pour 2016 semblent difficiles à tenir. Cette année devait pourtant être la dernière a présenter un déficit public supérieur à 3%, avant le redressement promis pour 2017. Or, il apparait qu’il existe un fort risque de dérapage des finances publiques, que l’IFRAP estime à 7.6 milliards d’euros. Si les hypothèses macroéconomiques très optimistes se révélaient fausses, il pourrait en résulter une perte supplémentaire de 5,7 milliards d’euros de recettes escomptées. Enfin, les économies espérés sur la baisse ou la non-augmentation de la masse salariale des fonctionnaires est peu crédible : la hausse des effectifs de l’Etat « rend difficile la stabilisation du solde de l’Etat qui concentre tous les déficits » ; quant au gel de l’augmentation des effectifs au niveau des collectivités territoriales, il semble inenvisageable. Il apparaît donc qu’une fois encore, 2016 sera l’année de tous les renoncements au niveau budgétaire.
Source : Budget 2016, mensuel de la fondation IFRAP, n°162.