Dans sa lettre n°49 de décembre 2015, l’INSEE revient sur le bilan du secteur agroalimentaire pour l’année 2014 ; s’appuyant sur les comptes nationaux annuels (base 2010) qui permettent d’évaluer l’évolution de la production et les échanges extérieurs des produits issus de la branche agroalimentaire, elle s’attache également à observer l’activité salariale produite par cette activité en se référant au dispositif statistique Esane (Élaboration des statistiques annuelles d’entreprises).
Avec 60 500 entreprises en 2013, l’industrie agroalimentaire génère un chiffre d’affaire de 184 milliards d’euros. La majorité de ce montant est issue de la production agroalimentaire (86%) ; à moindre degré, il est produit par ses activités de commerce de gros (11%). Année de l’atténuation du recul de production, 2014 est également marquée par la réduction de l’excédent commercial. Au contraire des exportations, en baisse de 0,4%, les importations sont au contraire en hausse – avec 0.7 % d’augmentation. Cette décroissance s’inscrit dans une perspective internationale, provoquée par les mesures prises à l’égard des relations avec la Russie et les pays du Moyen-Orient : la suppression des aides européennes a ainsi influé sur l’acheminement des viandes de volailles exportées au Proche-Orient, provoquant un déficit des exportations. A l’aune de la prorogation des sanctions de l’Union Européenne à l’égard de la Russie, cette décroissance risque de s’accroître : inanité de ces mesures punitives, qui pénalisent davantage l’agriculture française (Vladimir Poutine a suspendu les importations des pays ayant prononcé les sanctions) que le pays visé. « La France perd 100 millions d’euros de chiffre d’affaires en n’exportant plus de porc vers la Russie » précisait d’ailleurs Guillaume Roué, Président d’Inaporc. Elevée à près de 4 milliards d’euros, le manque à gagner pour l’Union Européenne est colossale : avec la perte de ses alliés européens, la Russie retrouve ses anciens fournisseurs, partenaires réguliers proposant une main d’œuvre moins onéreuse et des réglementations moins contraignantes : à plus large échelle, cette mesure inscrit donc l’Union Européenne dans un jeu de concurrence qu’elle, au regard de la crise financière actuelle, n’a pas le luxe de s’offrir. Pourtant, avec une décroissance globale de 0.5% – part moins importante que pour les deux années précédentes, l’industrie agroalimentaire reste globalement stable.
Emploi
Avec une perte de 6% de ses effectifs entre 2000 et 2014, le secteur agroalimentaire voit la diminution de l’emploi arriver à son terme pour l’année 2014 : un regain de 0.2 % de croissance de ses emplois vient pallier le déficit auquel se confronte le secteur de l’industrie manufacturière, dont les effectifs ont été réduits de plus du quart malgré une reprise d’activité significative dans cette branche – hausse de 0.3% en 2014.
Avec 552 000 salariés, l’industrie agroalimentaire emploie un personnel surtout intégré dans des entreprises comptant moins de dix salariés ; la valeur ajoutée du secteur est cependant en majorité générée par les personnels issus des grandes entreprises de plus de 250 salariés, qui recrutent 38 % des effectifs et sont à l’origine de la génération de la moitié de la valeur ajoutée du secteur. L’intensité capitalistique atteinte par l’industrie agroalimentaire est plus faible que celle de l’industrie manufacturière ; à l’inverse, le taux d’investissement de l’industrie agroalimentaire, à hauteur de 17%, dépasse celui de l’industrie manufacturière (15%) – pour l’année 2013.
La nécessité est à la sauvegarde de ce secteur agroalimentaire par l’établissement d’un protectionnisme intelligent : préserver la filière agroalimentaire française doit constituer une priorité. Une réglementation sensée de la production agricole française doit passer par une révision des normes européennes imposantes et déracinées, qui soumettent aux agriculteurs français une production massive au détriment de la qualité de leurs produits.
Source : lettre de l’INSEE, n°49, décembre 2015.