Dans la longue suite des non-événements de l’histoire politique de la Vème République, l’élection de Laurent Wauquiez à la tête de Les Républicains dimanche 10 décembre a toute sa place. Suivant les obsèques pompeuses de Johnny, l’actualité du moment, le triomphe interne de Laurent Wauquiez ne crée ni la surprise ni l’allégresse, malgré un score frôlant les 75%, avec une participation honorable puisque 100 000 adhérents se sont prononcés sur les 235 000 que compte le parti.
Wauquiez à la tête de LR ? Une nouvelle annoncée depuis la fin de « la primaire de la droite et du centre » remportée par François Fillon il y a plus d’un an. Ses challengers d’ailleurs n’étaient que des figurants en mal de reconnaissance ou d’arrivisme, en l’occurrence Florence Portelli et Maël de Calan : une conseillère régionale d’Ile-de-France et un conseiller départemental du Finistère… On a connu la droite de gouvernement, comme elle se nomme, plus ambitieuse.
Quant au victorieux Wauquiez, brillant produit des grandes écoles de la République, il n’en finit plus de vouloir faire peuple et enraciné au risque du ridicule. Je m’interroge donc sur ses réelles ambitions pour le pays. Sur la sienne propre, peu de doutes subsistent. Il ne pense qu’à l’Elysée dit-on, et il ne le dément pas. Non, en vérité je me demande si le Parisien de la Haute-Loire veut rassembler les droites de conviction et se jeter dans la bataille de France pour entamer un réel redressement du pays, ou appâter le chaland comme son modèle et prédécesseur Nicolas Sarközy… Beaucoup de verbe et puis par la suite toujours plus d’immigration, de reniement, de ventes des biens français à l’étranger, et de cocufiage électoral. Bref du grand classique de la droite gaulliste depuis 60 ans : une fois au pouvoir, il n’y a que les promesses qui restent de droite.
Alors, toujours militant de l’union des droites, je ne peux injurier l’avenir ni même Laurent Wauquiez, mais la prudence commande de ne pas être dupe une nouvelle fois. Je rejoins l’analyse du nouveau président des Républicains lorsqu’il déclare dans Causeur : « Depuis trente ans, certains dans ma famille politique ont accumulé une telle série de démissions et de renoncements idéologiques que le seul sujet qu’ils s’autorisent à débattre, c’est la bonne gestion des déficits comptables. Tout cela pour savoir si le déficit doit être à 2,9 ou 3,1% du PIB… » Doit-on cependant y croire ? Son parcours ne relève pas de la plus grande cohérence idéologique passant du centrisme européiste et béat à un populisme droitier qui confond convictions et emportements médiatiques. Le profil droitier de Laurent Wauquiez est surtout mis en exergue par des médias de gauche en mal de démon à combattre. Adoptant un discours qui se veut ferme sur la défense des valeurs, envoyant des signaux conservateurs au noyau dur de son électorat, Laurent Wauquiez n’a rien renié de la feuille de route mondialiste. Il le dit lui-même : « Réussir dans la mondialisation n’empêche pas de rester un peuple ». Or, c’est bien là que le bât blesse car la mondialisation aussi bien dans ses racines idéologiques que dans les faits détruit les peuples qui sont autant d’obstacles à son accomplissement.
L’élection de Laurent Wauquiez, et surtout la situation incertaine du parti Les Républicains, ont fait quitter le navire à ceux qui ne jurent que par leur ambition personnelle. L’état-major de LR n’a jamais été autant à droite lit-on de Libération à L’Humanité. Ciel, un parti de droite s’affirmant de droite… Quel scandale !
Permettez-moi cependant de ne pas me reposer sur la fidélité aléatoire des paroles d’un ancien ministre. Je préfère constater avec cette élection interne que la grande majorité des adhérents LR se reconnaissent, eux, dans une défense claire et offensive de l’identité et de l’enracinement. Si les électeurs ont voté Wauquiez, c’est justement parce qu’il représente à cet instant celui qui porte cette défense au milieu d’un néant politique rarement constaté. Je le redis ici, l’union des droites ne se fera que par les militants et les électeurs, et par l’entente ponctuelle et progressive des élus locaux. Je ne compte pas sur une direction de parti, esclave d’intérêts bien éloignés du bien commun, pour réaliser une quelconque union qui ne peut réussir que si elle s’impose aux dits partis comme un fait. En clair, espérons que les chefs suivront leurs troupes, et que les troupes marchent dans le bon sens.
Jacques Bompard